FO-Cadres a régulièrement dénoncé cette déréglementation du temps de travail. Une position d’ailleurs partagée par le Comité européen des droits sociaux, qui a sanctionné à plusieurs reprises la France pour violation de la charte sociale européenne, notamment en ce que la durée hebdomadaire de travail autorisée pour les salariés relevant du forfait jours est excessive.
Egalement, la Cour de cassation est intervenue par un arrêt du 29 juin 2011 pour préciser le cadrage conventionnel et décider que toute convention de forfait jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires. Les accords collectifs doivent désormais prévoir des dispositions de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au forfait jours.
Si l’accord de branche sur l’organisation du temps de travail de la métallurgie s’en est trouvé conforté, il n’en a pas été de même pour les conventions de forfait jours conclues en application notamment de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail dans la branche des bureaux d’études et sociétés de conseil (SYNTEC).
Tenant compte de la décision de la Haute Courdu 24 avril 2013, une négociation s’est ouverte et a abouti à la conclusion d’un avenant le 1er avril 2014, non signé par FO, pour garantir le forfait jours. Une « sécurisation » toute relative puisque le texte se contente de rappeler l’obligation de respecter les durées minimales de repos (11 heures par jour et 35 heures par semaine) et assure son effectivité par un droit à la déconnexion des outils de communication à distance, qui a indument bénéficié d’un intérêt médiatique !
En effet, si cette disposition a beaucoup fait parler d’elle, on est loin d’un nouvel acquis social, puisqu’il s’agit uniquement de garantir le droit au repos des cadres au forfait jours à qui il appartiendra en plus de le faire respecter eux-mêmes.
C’est cette même logique du transfert de responsabilités qui s’applique à la création d’une alerte individuelle pour déclencher un entretien sur le suivi de la charge de travail du salarié lorsque celui-ci rencontre une difficulté inhabituelle. Que dire enfin d’un texte dit de sécurisation qui en profite pour prévoir un dispositif de rachat permettant de porter le nombre de jours travaillés jusqu’à 230 jours, avec une majoration de salaire qui augmente avec le nombre de jours de repos auquel le cadre renonce (20% puis 35% au-delà de 222 jours).
FO-Cadres n’est toutefois pas opposé au forfait jours, ce dispositif correspond bien à un besoin des cadres en termes de liberté et d’autonomie dans l’organisation de leur temps de travail. Mais le forfait jours ne peut s’appliquer à tous et s’affranchir de toute référence horaire sous peine de considérer le dispositif comme objet de servitude et de souffrance.
En effet, si les cadres déclarent en moyenne des durées de travail plus longues que les autres catégories de salariés, avec notamment une durée annuelle effective de 1 867 heures, celle des salariés en forfait jours explose. Ainsi, pour exemple entre 2007 et 2011, la durée travaillée par les salariés au forfait jours a progressé de plus de 120 heures, soit 2,4 heures de plus par semaine pour atteindre le chiffre édifiant de 1939 heures par an. Rappelons tout de même que la durée légale du temps de travail est de 35 heures par semaine ou 1607 heures par an !
Pour FO-Cadres, la véritable sécurisation des forfaits jours nécessite plusieurs éléments d’encadrement strict pour garantir le droit à la santé et au repos. Il en va ainsi de la définition par des critères objectifs stricts de la notion d’autonomie, du nombre maximal de jours travaillés dans l’année qui ne doit pas excéder 218 jours, du respect des durées maximales journalières et hebdomadaires de travail, ou encore de la question de la majoration de salaire par jour supplémentaire travaillé qui doit être au minimum équivalente à celle du régime des heures supplémentaires.