Cette loi « fourre-tout » compte en effet 134 articles, dont une vingtaine relève du droit du travail et de la sécurité sociale. Bien loin de prévoir une simple simplification du droit, le texte modifie plusieurs dispositions du Code du travail, dont certaines sont particulièrement dangereuses pour les droits des salariés (Cf. Circulaire Confédérale du Secteur juridique n°56/2012 du 27 mars 2012 relative aux principales dispositions de la loi WARSMANN).

Il en est tout particulièrement ainsi de l’article 45 de la loi WARSMANN (article L3122-6 nouveau du Code du travail) qui prévoit que la mise en place d’une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail.

Cette disposition, fermement combattu par FO dès l’origine, remet directement en cause la jurisprudence de la Cour de cassation qui dans un arrêt du 28 septembre 2010 (pourvoi n°08-43161) avait expressément affirmé qu’un accord collectif ne pouvait imposer une modulation du temps de travail sans obtenir au préalable le consentement exprès du salarié.

Ce dispositif est particulièrement dangereux puisqu’il va permettre aux employeurs d’imposer une plus grande flexibilité aux salariés, portant ainsi atteinte à leur vie familiale et personnelle, sans pour autant que ces derniers ne puissent se prévaloir des dispositions de leur contrat de travail. Cette disposition n’est toutefois pas applicable aux salariés à temps partiel.

Egalement, l’article 46 de la loi WARSMANN introduit le télétravail dans le Code du travail. La loi créée ainsi une nouvelle section dans le Code du travail (section 4 dans Le chapitre II du titre II du livre II de la première partie du Code). Les articles L1222-9 et L1222-10 reprennent les dispositions de l’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005, signé par FO.

Il en va ainsi de la définition du télétravail, celui-ci « désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication dans le cadre d’un contrat de travail ou d’un avenant à celui-ci. » Egalement, « le refus d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas un motif de rupture du contrat de travail ».

Sont aussi précisées les obligations à la charge des entreprises à l’égard des télétravailleurs, notamment la prise en charge des outils de travail (matériels, logiciels, abonnements, maintenance, etc.).

Mais la loi du 22 mars 2012 créée au passage une disposition inédite dans l’accord national interprofessionnel de 2005, qui remet en cause le principe même du volontariat. Il convient de préciser que l’introduction du télétravail n’était pas prévu dans la proposition de loi initiale, elle résulte d’un amendement présenté par le député UMP de la Manche, M. Philippe GOSSELIN.

Dans cet amendement, une disposition permettait à un employeur d’imposer le télétravail à ses salariés en cas de circonstances exceptionnelles. Des dérogations à l’accord du salarié qui pouvaient largement dépasser la seule menace d’épidémie. Ainsi, le texte prévoyait « qu’en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail est considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. »

Dès la première lecture du texte à l’Assemblée nationale, FO-Cadres particulièrement investi sur la question du télétravail et de son encadrement, avait vivement réagit le 11 octobre 2011 par un communiqué de presse et avait interpellé les députés à la lecture de cette disposition. FO-Cadres avait demandé la suppression pure et simple de cet article afin de lever toute insécurité juridique.

A l’issue de la discussion parlementaire, le nouvel article L1222-11 du Code du travail prévoit qu’en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. Les conditions et les modalités d’application de cet article devront être définies par décret en Conseil d’Etat

Si le régime de la modification du contrat de travail et l’accord du salarié ne sont plus obligatoirement exclus comme cela était initialement prévu, cette rédaction est insuffisante au regard de nos exigences. Pour cela, FO-Cadres restera extrêmement vigilant sur la teneur du décret, afin d’éviter que l’inscription du télétravail dans le Code du travail ne participe in fine à sa dérégulation.