L’article L3121-64 du Code du travail fixe une liste d’éléments devant être fixées par l’accord collectif prévoyant la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours.
- Négocier une rémunération correspondant au travail fourni
Le principe même du forfait jours accroît sensiblement le temps de travail des cadres soumis à ce dispositif. Leur rémunération doit dès lors être proportionnée à l’organisation de travail qui est la-leur et à l’implication professionnelle dont ils font part. La rémunération d’un salarié au forfait doit être supérieure à celle d’un salarié qui ne l’est pas afin de prendre en compte sa quantité de travail supérieure.
- Sécuriser la mise en place du forfait jours
Cibler la population éligible
Les forfaits jours peuvent s’adresser à deux groupes de salariés : les cadres non-soumis à l’horaire collectif de travail et les salariés autonomes. Dans les deux cas, l’élément essentiel est « l’autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps. » L’accord collectif doit identifier les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention de forfait. Les dispositions conventionnelles peuvent également ajouter des conditions complémentaires telles qu’une classification minimale, une autonomie dans le mode d’organisation du travail et dans la fixation de l’horaire de travail. L’un des risques en ne ciblant pas spécifiquement une population éligible est de dévoyer le dispositif des forfaits jours en l’appliquant à des salariés non concernés, dans le seul but de ne plus payer les heures supplémentaires. La réalité de l’autonomie du cadre est d’ailleurs contrôlée en cas de contentieux. Peu importe qu’il relève de la catégorie prévue par l’accord collectif, le juge vérifiera que les fonctions exercées par le salarié correspondent réellement à la condition d’autonomie.
Encadrer les conventions individuelles
La mise en place du forfait jours dans l’entreprise nécessite qu’un accord collectif le prévoit expressément. À défaut, aucune convention de forfait ne peut être valablement conclue, même avec l’accord express du salarié.
Aujourd’hui, l’accord d’entreprise prime sur l’accord de branche, même si ce dernier interdit d’y déroger. FO-Cadres condamne cette hiérarchisation, parce que les accords de branche sont généralement plus protecteurs que les accords d’entreprise. Il est donc indispensable d’accorder une vigilance renforcée aux accords d’entreprise qui sont l’unique protection collective avant la convention individuelle de forfait. C’est la raison pour laquelle les clauses conventionnelles doivent être de nature à garantir une amplitude et une charge de travail raisonnables, à permettre la protection de la santé et de la sécurité du salarié et encore à assurer l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle.
- Maintenir la santé et la sécurité des salariés
Limiter le nombre de jours travaillés
Le nombre de jours travaillés dans l’année ne peut être supérieur, en principe, à 218. Cependant, il peut être soumis à des dérogations qui portent le nombre de jours travaillés maximal à 235 jours. En effet, il est possible pour le salarié de renoncer à des jours de repos — jusqu’à 17 jours de repos non-pris pour une convention de 218 jours travaillés. La convention applicable dans l’entreprise peut également prévoir une durée différente.
Assurer le suivi de la charge de travail
L’accord collectif doit prévoir les modalités selon lesquelles l’employeur assure le suivi régulier de la charge de travail. Or, de nombreux dispositifs ont été jugés insuffisants pour garantir la santé et la sécurité des salariés.
FO-Cadres observe que les systèmes auto-déclaratifs tendent à faire peser sur le salarié la garantie de son droit à la santé et au repos. Or, en vertu de l’article L. 4121-1 du Code du travail, obligation de sécurité de résultat pèse sur l’employeur. Dès lors, le mécanisme de suivi, pour être efficace, doit être encadré par l’employeur et non laissé à la seule charge de l’employé.
Évaluer la charge de travail
L’accord collectif doit également prévoir l’évaluation de la charge de travail du salarié.
Concrètement, il faudrait compléter la clause invalide par une clause imposant à l’employeur de prendre des mesures correctrices pour remédier à d’éventuels excès. L’important est de réagir en temps utile à l’articulation entre la charge de travail et une durée du travail raisonnable. Dès qu’un déséquilibre est constaté il est nécessaire que des mesures concrètes soient prises afin d’alléger la charge de travail. En effet, la durée du travail dès lors qu’elle est raisonnable au regard des temps de repos qu’elle permet, ne doit en aucun cas être une variable d’ajustement.
- Encadrer le suivi du dispositif
Échanger avec l’employeur
L’accord met en place un entretien, au moins annuel, entre le salarié et son supérieur hiérarchique pour évoquer l’organisation, la charge de travail, l’amplitude des journées de travail, l’articulation entre les sphères privée et professionnelle.
Cet entretien a lieu une fois par an et aborde de nombreux points qui ont une incidence directe sur la qualité de vie au travail du salarié au forfait. Il vise à garantir le suivi de la charge de travail, notamment pour assurer le respect des temps de repos au cours de la semaine.
- Garantir un environnement de travail sain et sécurisé
Exercer le droit à la déconnexion
L’ère du digital bouleverse l’ensemble des sphères de vie ; dès lors le droit à la déconnexion a pour objectif d’articuler la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés et de prévenir le burn-out. L’effectivité de ce droit autorise donc les salariés à ne pas se connecter aux outils numériques fournis par l’employeur (ordinateurs, téléphones portables, etc.) en dehors de leur temps de travail (soirée, week-end, RTT, congés payés, etc.). Le droit au repos est essentiel au titre de la promotion de la santé et de la sécurité de tous les salariés.
Encadrer le télétravail
Le télétravail n’est pas incompatible avec le forfait en jours. Mais la prudence est requise. En effet, sans horaires de travail définis, les cadres sont plus enclins à recevoir en permanence des appels ou des e-mails professionnels. La frontière entre temps de travail et temps de repos n’étant plus constituée par un horaire précis ni par un espace dédié, le risque est important de rester en permanence disponible pour l’entreprise. En vertu de ces éléments, le salarié doit annuellement faire état auprès de son supérieur de l’articulation entre télétravail et forfait-jours.
Pour aller plus loin : consulter notre guide forfait-jours sur notre site fo-cadres.fr