En l'espèce, un avenant au contrat de travail d'un ingénieur commercial prévoyait un salaire fixe mensuel auquel pouvait s'ajouter une rémunération variable en cas d'atteinte d'objectifs déterminés unilatéralement par l'employeur, dans le cadre de plans de rémunération variable. L'employeur avait ajouté un objectif supplémentaire à ceux déjà applicables et le cadre qui n'étant pas parvenu à atteindre les objectifs ainsi fixés avait vu la part variable de sa rémunération baisser. Considérant que l'employeur aurait du respecter le régime de la modification du contrat de travail et donc obtenir son accord, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes pour rappel de salaires.

Débouté par la juridiction prud'homale, le salarié a obtenu gain de cause devant la Cour d'appel. Cette dernière a ainsi décidé que si la fixation des objectifs relève du pouvoir de direction de l'employeur, la modification de la base de calcul de la rémunération aurait dû recueillir l'accord du salarié, car elle a pour conséquence directe de réduire sa rémunération variable.

Une décision des plus logiques au regard de la jurisprudence constante de la Cour de cassation en la matière. A cet égard on peut citer l'arrêt du 28 octobre 2008 par lequel la Haute cour décidait qu'en modifiant, sans l'accord du salarié, la nature des objectifs à atteindre, lesquels déterminaient la part variable de la rémunération, en ajoutant aux objectifs de vente initialement prévus des objectifs d'ouverture et de réactivation de compte, l'employeur a modifié unilatéralement le contrat de travail du salarié.

La condamnation de l'employeur était donc évidente et la décision de la Cour de cassation ne devait que confirmer celle rendue en appel. Et pourtant adoptant pour la première fois une solution contraire, la Cour décide que lorsque le contrat de travail (ou un avenant à celui-ci) prévoit que les objectifs sont fixés par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier sans l'accord du salarié dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'activité. On comprend alors que le fait que la modification des objectifs ait une incidence sur la rémunération variable du salarié importe peu, le régime de la modification du contrat est écarté et l'accord du salarié n'est pas exigé.

En connaissance de cette décision, la seule clause contractuelle qui permet de contourner le pouvoir de l'employeur est celle qui définit d'un commun accord les objectifs à atteindre. En effet si, pour une année donnée, l'employeur et le salarié ne parviennent pas à s'entendre, c'est au juge de fixer les droits du salarié et l'employeur ne pourra pas agir unilatéralement.