Tout changer pour que rien ne change !
L'édito d'Eric Pérès
24/09/2014
D’Ayrault 1 et 2 à Valls 1 et 2, les gouvernements se succèdent et les orientations politiques demeurent. Le dernier discours du chef de l’État confirme le dogmatisme qui préside aux destinées de notre pays : le cap de l'austérité est maintenu envers et contre tous.
De l’austérité à la rigueur le mouvement sémantique n’a que peu d’effet sur la réalité vécue par les salariés. Les données en témoignent : une hausse continue du chômage, une précarité grandissante, une croissance atone aux limites de la récession, des rentrées fiscales au plus bas et pour couronner le tout une dynamique déflationniste dans toute la zone euro. Même du côté du FMI on entend le message selon lequel ces orientations sont contre-productives. L’austérité budgétaire représente des pertes d’activités et de croissance. Une politique de l’offre alors même que la demande est au point zéro et que la déflation gagne le continent européen relève du non-sens économique le plus absolu.
Et ce n'est certainement pas la suppression de la première tranche d'impôts qui nous sortira d’affaire. Elle contribuera à reconcentrer l'impôt une fois de plus sur les seules classes moyennes et aggravera les inégalités devant la charge publique. Ce n'est certainement pas non plus la revalorisation de 8 € par mois du minimum vieillesse, ni le forfait de 40 € pour les petites pensions qui changeront la donne. Les retraités jugeront par eux même l'écart entre les 250 millions que coûtera cette mesure et les 41 milliards consentis sans contrepartie aux entreprises dans le cadre du pacte de responsabilité.
Il faut bien se rendre à l’évidence : non seulement notre économie est au plus mal, mais l’obstination aveugle dont font preuve nos politiques laisse craindre le pire. Car si ce levier de l’austérité budgétaire ne remplit pas les fonctions annoncées, il représente un moyen pour détricoter l'État social sous couvert de réformes structurelles. Les attaques contre les systèmes de retraite, de santé, les allocations chômage, le salaire minimum, la durée légale du travail ont vite trouvé leur place dans les propositions du MEDEF, profitant de la crise pour imposer sa thérapie de choc sous l’égide de la bonne gestion financière et de l'écoute sensible du Gouvernement.
Toutes ces orientations sont à rebours des attentes et des conditions pour faire émerger la compétitivité et l‘innovation, pour recouvrir les ressorts de la croissance. Pis encore, elles font le lit de toutes les haines et font courir à la France comme à toute l'Europe des risques inconsidérés. L'alternative consisterait à mettre un terme à l'austérité budgétaire au niveau national, à renoncer à vouloir faire baisser partout le coût du travail et à enclencher un effort substantiel d’investissement, financé par endettement, au niveau européen.
Il faut pour cela une véritable audace politique pour cesser de poursuivre les préconisations de la chancelière Merkel, lesquelles s'inscrivent dans les pas des réformes Schröder, et exiger de sa part une organisation économique interne plus solidaire et plus active.
Mais cela ne semble pas être à l'ordre du jour du chef de l'État, soucieux de tenir bon la barre d'une économie en perdition. Définitivement, le changement n'est pas pour maintenant !