Les pratiques antisyndicales dans le monde
06/10/2021
Les corps intermédiaires sont perçus comme un contrepouvoir qui pourraient mettre à mal le libéralisme politique ou économique. Les pratiques antisyndicales s’exercent et se développent toutefois différemment en fonction de l’histoire syndicale du pays et du régime politique en vigueur.
Dans les régimes autoritaires, le syndicalisme existe et est reconnu. La question est de savoir à quel prix. Ainsi, au Guatemala ou encore en Colombie, les assassinats de personnes exerçant des activités syndicales sont récurrents[1]. Le syndicalisme est réprimé afin que celui-ci ne puisse promouvoir une liberté qui pourrait susciter une vague de manifestations populaires contre les régimes en place. En effet, les organisations syndicales - sous couvert de la liberté d’association - ont vocation à développer et à inciter aux libertés d’opinion et d’expression, actions fortement réprimées dans les régimes totalitaires et autoritaires.
Cependant, cette affirmation peut être contrebalancée au regard du cas de l’Inde. Ce pays est démocratique et, pour autant, les syndicats ne peuvent s’implanter dans l’entreprise du fait du comportement des employeurs. Par exemple, ces derniers répondent aux grèves par des lock-out, aussi dénommée grève patronale. Il s’agit de la fermeture temporaire d’un établissement à l’initiative de l’employeur pour répondre à un conflit collectif. Durant ce laps de temps, les salariés non-grévistes ne sont pas rémunérés. Le but est de faire pression sur les salariés grévistes pour qu’ils reprennent le travail. En raison de ces éléments, l’Inde n’a pas ratifié les deux conventions fondamentales de l’OIT (n°87 et n°98).
Aux Etats-Unis, les campagnes d’anti-syndicalisation sont reconnues afin que les employeurs informent les salariés des conséquences de l’implantation des corps intermédiaires dans leur structure.
Un autre cas pour le moins étonnant est celui de la Grande-Bretagne, où aucune disposition législative n’a été promulguée afin de protéger les syndicalistes et où le recours aux listes de militants syndicaux est récurrent. Malgré tout, et grâce au concours des organisations syndicales, ces pratiques ont été officiellement reconnues et des dommages et intérêts ont été accordés pour compenser le préjudice subi. En 2016, un syndicat a ainsi obtenu 5,6 millions de livres sterling pour soixante et onze ouvriers sans emploi depuis plusieurs années car leurs noms étaient inscrits sur une liste noire[2].
L’effectivité de la liberté syndicale à travers l’éviction des discriminations est un objectif à atteindre. Cette affirmation, bien que nécessaire, ne semble pas réalisable dans tous les pays, et ce quel que soit le régime politique en place.
[1] T. Amossé et J.-M. Denis, Introduction, Discrimination syndicale et formes d’anti-syndicalisme dans le monde, Repères internationaux et parcours de lecture, Travail et Emploi, avril-juin 2016, n°146, p. 7.
[2] S. Jefferys, Des syndicalistes britanniques toujours blacklistés ! L’anti-syndicalisme patronal au Royaume-Uni, Travail et emploi, 2016/2, n°146, p. 17.