L’allongement de la vie professionnelle représente ainsi un enjeu crucial, y compris chez les cadres, avec un impact sur les conditions de vie des séniors demandeurs d’emploi et sur leur retour à l’emploi, tout comme sur le maintien en emploi des séniors en poste. Or, les entreprises demeurent réticentes à recruter des cadres séniors. Lorsqu’elles recherchent des profils expérimentés, les cadres ayant de 5 à 20 ans d’expérience, supposés plus rapidement opérationnels, sont privilégiés. Les cadres avec 20 ans d’expérience ou plus, eux, sont toujours la catégorie la moins favorisée dans les intentions de recrutement : ils représentent environ 5 % du total.
Aussi, un grand nombre de cadres séniors figurent parmi les DELD (demandeurs d’emploi de longue durée, c’est-à-dire inscrits à France Travail depuis plus de 12 mois). Les obstacles à leur retour à l’emploi ont été largement documentés, parmi lesquels certains rejets de la part des recruteurs, appuyés sur des stéréotypes globaux et négatifs de nature discriminatoire.
Pourtant, les bénéfices de la présence des cadres séniors au sein des équipes de travail sont là aussi largement démontrés. Ainsi, ceux-ci ne sont pas plus difficiles à manager, même si leurs managers ne peuvent se dispenser d’une combinaison adéquate de confiance, d’écoute et de respect ; ils ne sont pas désinvestis, mais manifestent fidélité et loyauté à leur entreprise ; ils ne sont pas allergiques à des évolutions technologiques qu’ils ont déjà appris à accompagner. Joints à la constatation de l’efficacité mitigée de nombre de mesures réglementaires, ces éléments vont dans le sens de l’idée selon laquelle « la première clé pour l’emploi des séniors, c’est un changement de culture dans les entreprises ».
C’est pourquoi, à travers la présente étude, l’Apec cherche à mieux comprendre comment les cadres séniors en poste se positionnent spécifiquement face à leur dernière partie de carrière, afin de démontrer, une fois encore, qu’ils ont toute leur place dans l’entreprise et que les politiques RH doivent davantage les prendre en compte dans toute leur spécificité, mais aussi leur diversité.
- Des cadres séniors (de 55 ans et plus) engagés, avec des inquiétudes spécifiques :
7 cadres séniors sur 10 sont présents dans leur entreprise depuis au moins 20 ans. Cette ancienneté importante s’accompagne d’un fort attachement à l’entreprise et d’un important investissement dans le travail. Les cadres seniors sont massivement investis dans leur travail, et en attente de nouvelles missions et de stimulation. 91 % d’entre eux se déclarent engagés, 68 % souhaitent conserver leur niveau de responsabilité, 34 % disent aborder ces dernières années avec une forte motivation. 6 cadres seniors sur 10 aimeraient piloter de nouveaux projets ou développer de nouvelles compétences. Tout en poursuivant leurs projets actuels, 8 cadres seniors sur 10 aimeraient passer plus de temps à transmettre, à former des collaborateurs et à partager leurs savoirs. Comme pour les autres cadres, cet investissement peut toutefois avoir des revers, notamment en matière de (sur)charge de travail et de stress, d’autant que les cadres séniors sont naturellement davantage concernés par les problèmes de santé. Un certain nombre mentionnent un contexte professionnel dégradé, où possibilités d’évolution et accès à la formation se font plus rares.
- 4 postures distinctes face à la suite de leur carrière :
34 % des cadres séniors abordent la dernière partie de leur vie professionnelle avec motivation. Ils voient majoritairement le travail comme une passion ou une réalisation de soi. Ils sont en attente de nouvelles missions et de stimulation. Pour 35 %, c’est la sérénité qui prédomine. Ils désirent principalement maintenir un statu quo en conservant leur situation actuelle. Pour 16 % des cadres séniors, la poursuite de leur parcours professionnel est marquée par l’anxiété. Ils ont le sentiment d’être menacés et font part d’une perte de sens dans le travail. Ils souhaitent avant tout des mesures d’allègement de charge et de pression. Un désengagement est exprimé par 15 % des cadres séniors. Ils n’expriment pas d’inquiétudes pour leur poste, mais y sont peu attachés. Ils veulent avant tout partir à la retraite le plus vite possible.
- Une volonté commune de contribuer à la transmission et à l’innovation :
En dépit des difficultés rencontrées par certains d’entre eux, la grande majorité des cadres séniors souhaitent rester engagés dans le travail jusqu’à leur départ à la retraite, tout en passant plus de temps à transmettre leur savoir-faire et à former les cadres plus jeunes. Ils souhaitent aussi très majoritairement mettre leur expérience au service de l’innovation, en développant leurs compétences et en proposant des idées et des solutions nouvelles. Pour les cadres séniors, c’est avant tout à l’entreprise de répondre à leurs attentes.