Entre les journées à rallonge et le travail amené à domicile, ils travaillent toujours davantage et beaucoup plus qu'ils ne le souhaitent. Malgré ce temps important que les cadres mettent à disposition de leur entreprise, les pouvoirs publics continuent à asséner que les français ne travaillent pas assez.


Pourtant, si l'on se compare à nos voisins européens selon l'enquête de l'institut européen Eurostat, la durée hebdomadaire du travail était en 2007 de 38 heures en France contre 37,9 heures dans l'Europe des 27. Au Royaume-Uni et aux États-Unis – pays souvent cités en exemple pour prôner une augmentation du temps de travail – la durée moyenne est respectivement de 36,9 et 33,7 heures par semaine... Il est donc erroné de dire que les français ne travaillent pas assez. En Europe, leur temps de travail est ainsi supérieur à celui des allemands, des danois, des suédois, des finlandais, des hollandais, des irlandais et des anglais (Fig. 2). Par contre, il est inférieur à celui des estoniens, des croates, des slovènes ou bien encore des grecs. Au vu de ces données, il semblerait que plus un pays est développé économiquement plus la durée moyenne du temps de travail diminue...
Historiquement le progrès économique s'est toujours accompagné d'une diminution de la durée du travail et du développement des loisirs et des services. Arriver à produire plus en travaillant moins est donc un réel signe de progrès économique et non l'inverse. Cela suppose bien évidemment de veiller aussi à l'aménagement et à l'amélioration des conditions de travail de salariés.


D'ailleurs si l'on se penche sur le cas des États-Unis, c'est la flexibilité à outrance du marché de l'emploi et non pas l'augmentation de la durée hebdomadaire de travail qui permet aux américains de maintenir une productivité élevée. Aussi, prendre l'exemple des pays anglo-saxons pour justifier la déréglementation du temps de travail qui a lieu actuellement en Europe et en France relève de la désinformation.


Ce modèle, vers lequel souhaitent tendre le gouvernement et le patronat n'a pas pour objectif d'augmenter la productivité et le dynamisme de la France. Toutes les données nationales et internationales confirment que les salariés français sont parmi les plus productifs au monde.


En réalité, les multiples attaques contre les 35 heures visent à remettre en cause la durée légale du temps de travail en permettant notamment de fixer, entreprise par entreprise, une durée hebdomadaire supérieure à 35 heures. L'autre enjeu des partisans de cette déréglementation est d'augmenter la flexibilité sans pour autant accroître la sécurité. Notamment la volonté d'étendre les forfaits jours à tous les salariés s'inscrit dans cette logique afin de ne plus avoir à payer les heures supplémentaires.


Aucun enjeu économique ne justifie donc l'attitude des pouvoirs publics concernant le temps de travail. La baisse du pouvoir d'achat - à laquelle le gouvernement prétend remédier en facilitant l'usage des heures supplémentaires - n'a jamais été provoqué par la réduction du temps du travail ! En revanche, la diminution de la part des salaires dans le PIB depuis 20 ans, l'intensification de la concurrence sur le marché de l'emploi et le tassement des salaires sont des causes indéniables de la baisse du pouvoir d'achat.


Une posture autrement plus efficace aurait été de miser sur une diminution du chômage et sur l'amélioration du taux d'emploi des seniors et des jeunes diplômés. De même, une action pour limiter le temps partiel subi aurait permis aux français de « travailler plus pour gagner plus ».


Plus globalement, une politique économique et industrielle tournée vers l'investissement, la recherche et le développement s'impose si l'on veux créer les emplois durables de demain.